:: Le 1er mai : une invention américaine
L’idée
d’une fête du travail voit le jour au moment de la Révolution
française. En 1793, Fabre d’Églantine, ami de Danton, est le premier à
instaurer une telle célébration dans le calendrier républicain au 1er
pluviôse (fin janvier). Paradoxalement, c’est outre-Atlantique
qu’il faut aller chercher les origines du 1er mai, aux États-Unis, où
ce jour n’a jamais été férié. En 1884, les syndicats américains se
donnent deux ans pour obtenir la diminution de la journée de travail à
huit heures. Il choisissent de lancer leur action le 1er mai, date à
laquelle bon nombres d’entreprises entament leur année comptable.
En 1886, face aux réticences de leurs employeurs à diminuer le temps de
travail, plus de 300 000 personnes font à nouveau grève. La
manifestation, violemment réprimée, fait trois morts parmi les
grévistes de la société Mac Cormick à Chicago. Au lendemain de cette
répression, une marche de protestation est organisée. La place
Haymarket est le théâtre d’un second drame : sept policiers sont tués
et de nombreux manifestants blessés. Malgré l’inexistence de preuves,
cinq syndicalistes anarchistes sont condamnés à mort et trois autres à
perpétuité.
En 1889, les congressistes de la IIe Internationale, réunis à Paris,
entrent dans la lutte pour la journée de huit heures. À l’instar de
l’American Federation of Labour (AFL), ils fixent la date du 1er mai
comme journée de leur revendication. Une manière de commémorer les
événements de Chicago, symboles d’une répression qui n’a pas dit son
dernier mot. En 1891, la manifestation du 1er mai à Fourmies, dans le
nord de la France, s’achève avec le triste bilan de 10 morts et 35
blessés.
:: Et le 1er mai devint la fête du travail
Le
1er mai prend vite un caractère international et revendicatif. Les
travailleurs continuent à se battre pour l’amélioration de leurs
conditions de travail. Une lutte qui porte ses fruits. « L’adoption de
la journée de huit heures ou de la semaine de quarante-huit heures »
est ainsi fixée « comme but à atteindre partout où elle n’a pas encore
été obtenue » par l’article 247 du Traité de Versailles.
À l’initiative de Lénine, le 1er mai devient en 1920 une journée chômée
en URSS. D’autres pays suivront peu à peu. En France, c’est sous la
houlette de René Belin, un ancien responsable de la CGT devenu ministre
de Pétain (sic), que le 1er mai devient chômé. Officiellement désigné
le 24 avril 1941 fête du travail et de la concorde sociale, la fête des
travailleurs est détournée dans le but de rapprocher les ouvriers du
régime de Vichy.
Le gouvernement issu de la Libération fait finalement du 1er mai un
jour férié et payé en 1947. Le 1er mai reste la date de la fête du
travail, une appellation commune qui n’apparaît toutefois pas dans le
Code du Travail.
:: Tour du monde des « 1er mai »
Que
font nos voisins européens le 1er mai ? Jour chômé en Allemagne, en
Belgique et au Luxembourg, le 1er mai est généralement ouvré aux
Pays-Bas et en Suisse. Cependant, certaines entreprises et
organisations internationales basées en Suisse accordent un jour de
congé à leurs employés.
En Italie, on fête le 1er mai avec, en prime, un grand concert sur la
Piazza del Popolo à Rome, qui réunit près d’un million de spectateurs.
Au Royaume-Uni, on se distingue : c’est le premier lundi de mai qui est
férié et non le 1er mai qui reste chômé dans les pays de l’Europe de
l’Est, tels que la Pologne et la Roumanie. Néanmoins, les défilés,
auparavant imposés par leur grand frère soviétique, n’ont plus cours.
Le Vappu,
1er mai finlandais, est férié et dignement, voire largement, célébré.
Il est à la fois fête des étudiants, fête du travail, célébration de
l’arrivée du printemps et survivance de vieux rites païens. À Moscou,
les grandes festivités et les défilés de l’ère soviétique ont disparu,
mais on continue à célébrer la « journée du printemps et du travail ».
L’Amérique du Nord (États-Unis et Canada), quant à elle, ne fête pas le 1er mai auquel elle préfère le Labor Day,
qui tombe le premier lundi de septembre. Cette fête du travail à
l’américaine ne fait volontairement pas référence aux événements de
Chicago et aux droits des travailleurs. Trop socialiste sans doute...
Chaque pays ou presque a sa fête du travail, généralement célébrée le
1er mai, même si quelques exceptions subsistent comme en Australie ou
au Japon.
Des manifestations protocolaires sont organisées dans les pays de
tradition socialiste, comme le Laos. Le tout, assure-t-on, dans le
respect des travailleurs.
:: Voici venu le temps du joli mois de mai…
L’histoire
du 1er mai est aussi liée à l’arrivée du printemps. À qui doit-on cette
fameuse tradition qui consiste à offrir un croquignolet brin de muguet
? Charles X, en 1561, décida d’offrir à chaque dame de la cour un lys
de mai. On peut aussi faire remonter cet usage à la fête druidique de
Beltaine qui marque le passage de la saison sombre à la saison
lumineuse. Chez les Romains, le 1er mai marquait l’apogée des
célébrations en l’honneur de Flora, déesse des fleurs. Une tradition
aux origines diverses et lointaines donc. Symbole de renouveau et du
printemps, symbole de bonheur et porte-bonheur, le gazon de Parnasse
annonce ainsi l’arrivée des beaux jours. Associé à la fête du
travail, le muguet n’a pas toujours été à la boutonnière des
manifestants. Au moment des premiers défilés, ils arboraient un
triangle rouge symbolisant la division de la journée de travail en
trois parties : travail, sommeil, loisirs. La fleur d’églantine
supplanta ensuite pour un temps le triangle rouge avant de se voir
définitivement voler la vedette par le muguet. Le régime de Vichy
voyait d’un mauvais œil l’églantine rouge associée à la gauche.
Autre tradition, l’arbre de mai est particulièrement répandu en
Bavière. Il s’agit d’un autre rite lié à la venue du printemps.
Fanfares et groupes folkloriques envahissent la place principale pour
soutenir ceux qui vont de leurs mains hisser le mât de mai, qui atteint
parfois les 30 m de haut. Après cette véritable épreuve de force, vient
le réconfort : les participants et les spectateurs dégustent saucisses,
bières et bretzels dans une ambiance bien guillerette.
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